MASQUES CÉSAR
1920 - 2020
Une histoire de la France au travers de ses têtes les plus célèbres.
Les masques César sont manufacturés et peints à la main en France, à Saumur, entre 1885 et les années 2000.
L'entreprise fonctionne jusqu'en 2023. Célèbres pour représenter des hommes politiques et vedettes du cinéma et de la chanson puis des personnages de séries et dessins animés avec l'avènement du téléviseur, ils ont suivi les évolutions technologiques en passant du papier mâché au plastique puis au latex coulé.
La naissance de la société César, son ascension et sa reconversion, reflètent les différents cycles d'industrialisation de la France, mais aussi un âge d'or du cinéma et de la télévision.
MASQUES EN CARTON
DE L'ÉCRITURE A L'ORNEMENT
La saga de la société César prend sa source au XIXe siècle avec la famille Barthélémy qui possède une manufacture de plumes d'oies pour l'écriture. Mais face à l'invention et l'industrialisation du stylo à plume, l'entreprise décline et décide d'utiliser les plumes restantes pour orner des loups et des masques de carnaval.
La société est ensuite vendue plusieurs fois jusqu'à appartenir à Monsieur Jules César en 1885. La société prend le nom de Maison César et s'installe à Saumur en Maine-et-Loire. Cette manufacture propose alors des masques en papier mâché de personnages et d'animaux, sur catalogue.
Le fils de Jules César, Guy, reprend les rênes de l'entreprise dans les années 30. Ce dernier négocie un contrat de licence avec Disney en 1938. L'entreprise commercialise alors des masques en carton plat de Mickey, Minnie et des trois petits cochons. En 1939, le carton plat est remplacé par du carton embouti : le carton est pressé à chaud contre un moule pour lui donner la forme souhaitée.
NOËL ET CARNAVAL
Dans le catalogue de 1951, parmi une tête de mort et différentes barbes, César propose deux éditions différentes de masques de Père Noël : Un Père Noël à barbe blanche (52 V) et un Père Noël à grande barbe blanche, au front haut et doté de deux oreilles (58 V). Avec le temps, les barbes ont perdu de leur panache.
Tarifs respectifs en 1951 : 100 et 140 francs pièce.
LES CÉLÉBRITÉS
Pour vendre davantage de masques et surtout en dehors des périodes dévolues à la fête que sont noël et le carnaval, César décide d'attirer une clientèle adulte.
La société familiale fabrique alors des masques à l'effigie des grandes vedettes de l'époque : Fernandel, Jean Gabin, Edith Piaf, Luis Mariano, et elle n'hésite pas à caricaturer des personnalités historiques et politiques telles que Léon Blum, Winston Churchill, Joseph Staline... Un masque d'Adolf Hitler est également proposé, mais la matrice est partiellement détruite par les allemands lors d'une visite de l'usine sous l'occupation.
Quant au masque du Général de Gaulle, il est censuré par son inspirateur lui-même, dans un souci de contrôle de son image.
L'usine de la société César, située quai Comte-Lair à Saumur, a été reconstruite à partir de 1948. Les bombardements de la Seconde Guerre mondiale avaient détruit le site d'origine. La reconstruction, achevée en 1949, a donné à l'usine une architecture moderne pour l'époque, qui mêlait des influences régionales et des éléments de l'Art déco.
L'ÂGE D'OR DU PLASTIQUE THERMOFORMÉ
L'année 1954 marque un tournant dans l'histoire de l'entreprise grâce à l'arrivée du plastique et de la technique du thermoformage. Des plaques de plastique PVC chauffées sont posées sur des moules, et sont retirées à froid.
Les masques sont ensuite peints avec des pochoirs et assemblés à la main. Dès lors, les masques en papier mâché disparaissent de leur catalogue progressivement jusqu'à leur arrêt total de production en 1958.
La Maison César devient prospère en s'associant avec les fabricants de déguisements et en multipliant les contrats de licence : cinéma, bandes dessinées, vedettes de la chanson...
Un contrat avec l'O.R.T.F. va leur permettre de capter les enfants et d'assurer la pérennité de leurs ventes. Plus de 500 masques seront inspirés par les dessins animés des années 1970/90.
Tout les personnages des films d'animation DISNEY ont droit à leur masque.
- Dans les années 1980, ce sont plus de 3 000 masques souples et 10 000 en P.V.C. qui sortent chaque jour de l'usine de Saumur.
- Ils sont disponibles partout, jusqu'à être mis en présentation devant les caisses des grandes surfaces. Les masques César deviennent un produit populaire et bon marché.
La société César a déménagé ses activités de production vers la zone industrielle du Clos Bonnet, au 154 boulevard Jean Moulin, à Saumur. Ce déménagement a eu lieu après le rachat de l'entreprise par le groupe Maasport en 1992. Le siège social de la société a également été transféré à cette adresse.
L'entreprise y a poursuivi son activité jusqu'à sa liquidation judiciaire en 2023
- César fabriquait aussi des masques pour d'autres distributeurs. Voici, par exemple, quelques masques conçus dans les années 1960 pour l'entreprise "Van Dam" située dans le Bronx aux États-Unis.
- Certains ont des yeux en 3D à la pupille mouvante.
Un distributeur Allemand.
RECONNAITRE UN MASQUE CESAR
Pendant de nombreuses années, le seul concurrent de César était la marque Italienne Festa. Puis, de nombreuses copies asiatiques ont inondé le marché. Même si la qualité de leur facture est très spécifique, il n'est pas toujours facile de reconnaitre un masque César.
- Avant 1950, la mention obligatoire "BREVETÉ S.G.D.G." (Sans Garantie Du Gouvernement) est apposée à l'intérieur des masques en carton embouti.
- Sur les masques en plastique des années 50 aux années 70, une étiquette avec le logo de la marque assurait l'authenticité du produit. Certains ont encore cette étiquette ou des autocollants.
- À partir de 1970, on peut reconnaitre un masque César par l'estampille gravée directement dans le PVC rigide ou souple.
- Le logo représentant un masque peut également les distinguer.
- Certains ont encore une étiquette agrafée sur le masque.

- À partir des années 1990, la société César transfère sa production à l'Ile Maurice. Le plastique utilisé évolue : il devient plus souple, moins fragile et plus agréable à porter. Les masques du Marsupilami et d'Arthur des Minimoys sont désormais fabriqués avec ce nouveau matériau.
- Le logo subit également une transformation.
LES MASQUES EN LATEX SOUPLE
En 1971, l'entreprise commercialise un nouveau type de masques : un masque intégral, seconde peau en vinyle, fabriqué à base de billes de latex coulées à chaud dans un masque inversé.
Au cours de cette décennie, César développe de nombreux masques en latex de visages originaux et de personnages historiques qui ne nécessitent pas l'acquisition de couteuses licences.
César s'exporte notamment aux États-Unis : l'entreprise réalise 50% de son chiffre d'affaires sur le territoire américain. (Ci-contre, couverture du catalogue américain 2004)

MICHEL FOUCAULT, sculpteur, caricaturiste.
Si certains masques doivent ressembler à l'original, d'autres, moins réalistes, plus comiques, demandent des talents de caricaturistes.
En 1983 Michel Foucault entre dans l'entreprise Saumuroise César. On peut dire qu'il va y trouver sa place puisqu'il ne la quittera qu'en 2020. Il va signer, pendant toute sa carrière, des centaines de sculptures-caricatures des grands de ce monde. Ces modèles serviront à la fabrication des moules permettant d'inonder la planète entière de sa fantaisie.
En 1994, un masque commercialisé sous le nom "LE MAGICIEN" est en réalité une caricature du sculpteur.
En 2012, il réalise pour une impression sur carton plat, les caricatures de six candidats à l'élection présidentielle française. Seuls cinq masques seront commercialisés, celui de Strauss-Kahn ayant été retiré quelques semaines avant le premier tour. Quelques 40 000 exemplaires partiront sur Internet et chez les grossistes avec Sarkozy et Hollande en tête de gondole. Un bon coup de pub pour le fabricant français en difficulté depuis un an.

En 1992, la société César déménage ses activités de production vers la zone industrielle du Clos Bonnet, au 154 boulevard Jean Moulin, à Saumur. Ce déménagement a lieu après le rachat de l'entreprise par le groupe Maasport. Le siège social de la société a également été transféré à cette adresse.
L'entreprise y a poursuivi son activité jusqu'à sa liquidation judiciaire en 2023


FIN DE CROISSANCE DES MASQUES POUR ENFANTS
La famille César étant arrivée à la fin de sa vie économique, elle décide de vendre son entreprise à la société Masport, société Lyonnaise spécialisée dans le déguisement en 1992. La Maison césar devient alors le Groupe César et avec Richard Roizen à sa tête, il se lance dans une stratégie de croissance externe. Le groupe César rachète Dekkertoys au Royaume-Uni, Josman en Espagne, Disguise aux États-Unis, France Cotillons, Joker en Italie et Hilka en Allemagne ainsi qu'un bureau de négoce à Hong Kong et un façonnier de panoplies à Madagascar où ils vont délocaliser leur production. Mais ils vont aussi devoir faire face à plusieurs défis.
Au début des années 2000, un phénomène commercial se met en place.
En l'espace de quatre ans, la traditionnelle fête d'origine Celtique Halloween
est importée en France. Les enfants ne se déguisent plus en leurs héros favoris,
mais en citrouilles, sorcières et fantômes. L'entreprise sent le filon, mais Halloween
ne rapporte pas autant de succès qu'en Amérique, entre autres, suit à une série de
faits-divers commis par des assaillants qui portaient un masque de clown (en
référence à un film culte de l'époque : Scream).
Même s'il reste leader sur son concurrent historique Festa, César est mis en difficulté face à la concurrence, non seulement des copies bon marché d'Extrême-Orient, mais aussi d'une société de taille qui arrive sur le marché : Rubie's, le numéro un américain. L'acquisition de Copyright sur les créations américaines devient très couteuse et des licences importantes comme "Star-Wars" lui échappent.

Quand, après 70 ans de collaboration, la marque César perd la licence Disney, les soucis financiers deviennent insurmontables. La production de masques à Saumur s'arrête en 2004 pour se délocaliser à l'Ile Maurice. En 2011, le groupe cesse d'acheter des licences, il est placé en redressement judiciaire et met en place un grand plan de licenciement. Le nouveau P.D.G. Frédéric Delaunay restructure l'emblématique société et elle entre en bourse en 2019. Elle compte alors une vingtaine d'employés, et ne vend plus que des déguisements et des accessoires de fête.
La crise sanitaire covid-19, l'augmentation imprévisible des prix du transport maritime et la perte du client Picwictoys, une chaine de magasins de jouets qui vient d'être rachetée par une multinationale, oblige à ce que la liquidation judiciaire soit prononcée le 29 mars 2023. L'activité cesse totalement le 31 mai faute de repreneur.
